TA GUEULE PICASSO

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Ta gueule Picasso

Jeudi soir on dîne avec C. à la Pizzetta lieu passablement bobo mais où les pizzas sont correctes. Elle, termine par un tiramisu dont je prélève- je le confesse- quelques cuillerées délicieuses. Puis nous nous rendons aux A où elle commande une crêpe au Nutella. Misère !!! Vendredi matin, direction Argenteuil sans vélo car il fait un bruit de bateau qui va se briser. Je marche sur le chemin que j’ai baptisé le Chemin des rats car j’en avais croisé un avec un certain déplaisir je dois le dire. Au bout de ce passage il y a un type dans une tente ( avant il n’avait même pas la tente ) . Je l’aperçois comme un Diogène contemporain, assis là bas dans son tonneau. Je le vois, il me voit.

—Madame!

J’approche. Il voudrait me donner de l’argent pour que j’aille acheter des croquettes . Le gros chat qui est là renifle du pain gelé dans de l’eau et du lait en plâtre. Va pour les croquettes , j’irai. Ah ce que j’ai oublié de dire c’est qu’il est paralysé mon Diogène. Ca facilite tout. Il me dit qu’il a une chose à me demander mais que c’est délicat . Pour appuyer ses dires il me tend ce que je décrypte immédiatement comme un pistolet  ( objet hospitalier qui permet aux hommes de pisser sans se lever ) Et me voilà chargée de l’arme liquide , et traversant le chemin pour vider ça où? Là… Là??? Là. dans l’herbe. Bon c’est fait. J’ai mes gants et ça ne me dégoute de toutes façons pas du tout. La misère, c’est la misère.

—Il vous faut autre chose?

—Oui je voudrais un livre de Vectorgo. A traduire Victor Hugo. Et aussi Alexandre Dumas et aussi l’histoire du Titanic. Il me montre son Evangile. Il n’est pas musulman.

J’apporterai ça.

C’est quand même fou. Etre démuni à ce point. J’ai prévenu la Croix rouge en maraude, mais… Il ne veut pas bouger? Ca semble terrible. J’ai repris joyeusement mon chemin vers l’atelier, me suis fait un bon Nescafé en montant le chauffage et en allumant la radio. J’ai savouré le soleil un moment en fermant les yeux puis je me suis changée, et mise au travail .

Pilates à 19h. Ca fait du bien. Dans le métro il y a une conversation entre trois femmes. J’entends la langue de Bergman, amusée. Amusée aussi à la lecture des entretiens entre Diderot et d’Alembert que bizarrement je n’avais jamais lu.

D’ALEMBERT. — Je voudrais bien que vous me disiez quelle différence vous mettez entre l’homme et la statue, entre le marbre et la chair.
DIDEROT. — Assez peu. On fait du marbre avec de la chair, et de la chair avec du marbre.
D’ALEMBERT. — Mais l’un n’est pas l’autre.
DIDEROT. — Comme ce que vous appelez la force vive n’est pas la force morte.
D’ALEMBERT. — Je ne vous entends pas.
DIDEROT. — Je m’explique. Le transport d’un corps d’un lieu dans un autre n’est pas le mouvement, ce n’en est que l’effet. Le mouvement est également et dans le corps transféré et dans le corps immobile.
D’ALEMBERT. — Cette façon de voir est nouvelle.  Puis passage rapide à la maison
 DIDEROT. — Elle n’en est pas moins vraie. Ôtez l’obstacle qui s’oppose au transport local du corps immobile, et il sera transféré. Supprimez par une raréfaction subite l’air qui environne cet énorme tronc de chêne, et l’eau qu’il contient, entrant tout à coup en expansion, le dispersera en cent mille éclats. J’en dis autant de votre propre corps.
D’ALEMBERT. — Soit. Mais quel rapport y a-t-il entre le mouvement et la sensibilité ? Serait-ce par hasard que vous reconnaîtriez une sensibilité active et une sensibilité inerte, comme il y a une force vive et une force morte ? Une force vive qui se manifeste par la translation, une force morte qui se manifeste par la pression ; une sensibilité active qui se caractérise par certaines actions remarquables dans l’animal et peut-être dans la plante ; et une sensibilité inerte dont on serait assuré par le passage à l’état de sensibilité active.
DIDEROT. — À merveille. Vous l’avez dit.
D’ALEMBERT. — Ainsi la statue n’a qu’une sensibilité inerte ; et l’homme, l’animal, la plante même peut-être, sont doués d’une sensibilité active.
DIDEROT. — Il y a sans doute cette différence entre le bloc de marbre et le tissu de chair ; mais vous concevez bien que ce n’est pas la seule.
D’ALEMBERT. — Assurément. Quelque ressemblance qu’il y ait entre la forme extérieure de l’homme et de la statue, il n’y a point de rapport entre leur organisation intérieure. Le ciseau du plus habile statuaire ne fait pas même un épiderme. Mais il y a un procédé fort simple pour faire passer une force morte à l’état de force vive ; c’est une expérience qui se répète sous nos yeux cent fois par jour ; au lieu que je ne vois pas trop comment on fait passer un corps de l’état de sensibilité inerte à l’état de sensibilité active.
DIDEROT. — C’est que vous ne voulez pas le voir. C’est un phénomène aussi commun.

Pas envie de bouger. Envie de ruminer et dessiner ici mais il y a ce truc à la MAison des Arts de Malakoff. Et je ne sais même pas ce qu’on va me demander. De toutes façons la réponse , je la déconnecte de la question et zou! je fais comme pour moi!!!En écoutant et regardant Dalida, Laissez moi danser, clip que j’ai trouvé sur le fB de T2P. Je m’émerveille de ce ridicule, ridicule joyeux et sublime. Les garçons danseurs d’une chorégraphie inqualifiable !!! Habillés en Années 80. Moustaches et bandanas, cuir moulant! Au secours!!!C’est trop bien. Je me souviens des nuits d’enregistrement , des tournages à la SFP , et des soirées chez Maritie et Gilbert Carpentier rue Guynemer. Marion SArraute, Dirk SAnders je crois .  Et quand corsetée à étouffer , dans mon carrosse st sous la neige artificielle j’ai failli avoir un malaise de figurante dans la tempête où on crevait de chaud. Ah oué j’avais oublié ça. Le cheval avec la calèche. Et le palais des congrés, les pizzas, plein de gens de bonne humeur qui racontaient des histoires, buvaient et bossaient comme des fous. R disait que tout était possible. Ils avaient imaginé je ne sais plus quoi, une banquise et des pingouins. Est arrivée la banquise avec ses pingouins. Je ne sais pas quel âge ils avaient les Carpentier. Je trouvais que c’était un beau couple. Née en 21 , ça veut dire qu’ils avaient 35 ou 36 ans de plus que moi , donc à peu près mon âge aujourd’hui.

J’ai fait peu de figuration mais j’adorais ça. Regarder, écouter les aigreurs et les rêves, faire croire au beau mec figurant professionnel qu’on est une cruche qui rêve d’être comédienne. Entendre la doublure lumière de Francoise Fabian, dire avec la bouche un peu tordue «  qu’elle est mieux qu’elle…”

Allez un petit coup de mourir sur scène. 

Je meurs de rire en voyant la photo que C. M’envoie: Lui avec une kippa.

Lundi , c’est du sérieux.

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